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Société

Clément Vergnhes : Un Rahui à Mataiea!

Publié le 6 décembre 2019

Après Rapa, Maiao et Teahupoo, c’est désormais Mataiea qui inscrit son nom sur la liste des communes à avoir rétabli le Rahui.  Cette interdiction temporaire de prélèvement de poisson dans le lagon vise à préserver la biodiversité marine, et résulte de 3 ans de pourparlers entre la population de pêcheurs et les élus de Teva I Uta.  Hommes de Polynésie a rencontré le référent de ce projet communal : Clément Vergnhes.

Espèces disparues

Si parfois chez nos voisins du Pacifique le Rahui est instauré dans le cas d’une disparition en mer, en Polynésie française il s’inscrit dans une logique de préservation des ressources naturelles lagonaires. Il y a 6 ans, Clément Vergnhes, habitant de Mataiea et élu de Teva I Uta en charge de la pêche, constate que le tapi’o et le tarao mata pu, deux espèces de poissons bien connues des pêcheurs de la commune, se font rares dans le lagon.

« Je me souviens, quand j’étais gamin on pêchait à la ligne et on sortait de belles carangues. »

L’activité de surpêche est pointée du doigt, mais pas seulement. Cette diminution de la masse poissonneuse est aussi due au climat, comme l’impact des cyclones, le réchauffement des océans et la descente de sédiments. Cette observation de 35 ans, Clément l’a partagée aux pêcheurs pendant trois ans et demi.

« Dans nos réunions, on a souvent comparé la mer à un garde-manger. Pour le préserver le plus longtemps possible, il est indispensable de réserver un banc récifal interdit à la pêche. »

L’exemple Teahupo’o

Pour fédérer les moins favorables et limiter les mouvements de contestation, Clément et les élus municipaux ont battu le pavé. De débats en porte-à-porte, de témoignages de Tavana à ceux de pêcheurs, les mentalités ont fini par évoluer jusqu’à susciter une prise de conscience. Le retour à un mode de vie ancestral est l’argument phare qui clôt les échanges populaires et permet d’obtenir l’unanimité des protagonistes.

« Autrefois on pêchait pour manger, aujourd’hui on pêche pour vendre. »

Comme exemple d’un Rahui réussi, Clément cite Teahupo’o – un sanctuaire pour coraux et poissons, leur offrant la possibilité de grandir à l’abri des prédateurs. Etabli en 2013 sur une superficie de 700 hectares, il témoigne d’un grand respect de cette tradition. Ce Rahui « hybride » présente l’avantage d’être géré par la population tout en bénéficiant de la protection juridique du code de l’environnement. Rapport écologique du CRIOBE (Centre de Recherches Insulaires et Observatoire de l’Environnement) à l’appui, Clément convainc.

 « La biomasse a été multipliée par dix et la population de poissons commerciaux pouvait se reproduire en toute quiétude à l’intérieur du Rahui. »

Le principe culturel du Rahui

La promesse d’une gestion durable de la biodiversité passe par les acteurs locaux, et Clément l’a bien compris. Il a donc sollicité le concours et l’implication des tupuna 1, des tahu’a tauta’i 2, des tahu’a ra’au 3 et tahu’a hiro’a tumu 4 de Teva I Uta.

« Si le rahui a permis de fédérer, c’est notamment grâce à la participation de référents comme « Papi co », pêcheur de toujours. »

Au comité de gestion figurent en bonne place des sommités de la culture, en charge de répertorier le nom des récifs et du mara’e 5 auquel ils sont rattachés. Au total 10,5km2 de surface lagonaire ont été choisis entre la commune de Mataiea et celle de Papara. Une plaque inaugurale scindée en deux scellera pour deux ans ce Rahui.

 « J’ai la chance de pêcher avec mon fils et je souhaite qu’il le fasse un jour avec ses enfants. C’est de notre devoir d’aînés de faire quelque chose. Si l’on ne fait rien, demain on risque de le regretter. »

1 ancêtres

2 experts de la pêche

3 experts des soins traditionnels

4 experts de la culture et des généalogies

5 Lieux de culte

Jeanne Phanariotis

Rédactrice Web

© Photos : Alexis Lagarde pour Hommes de Polynésie

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