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Évasion

Franck, des Marquises au Mexique : « partir pour mieux revenir »

Franck, des Marquises au Mexique : « partir pour mieux revenir »

Publié le 17 octobre 2018

Parti avec juste une valise et quelques économies en poche, Franck Pasquet ne se doutait pas que son aller-retour pour le Mexique allait se transformer en un aller simple. Et pourtant, plus de sept ans après, le jeune homme de 33 ans y est toujours. Il y danse le ‘ori tahiti et travaille comme web marketeur.

Né en Bretagne d’un père français et d’une mère marquisienne qui s’étaient rencontrés dans les années 70 en Polynésie, Franck Pasquet est venu vivre à Moorea à l’âge de 13 ans. Mais la Polynésie ne lui était pas inconnue, à l’âge de 5 ans déjà, il avait passé la moitié d’une année scolaire à Hiva Oa avec sa mère.

« Aux Marquises, il n’y avait pas beaucoup d’opportunités de travail, à Tahiti, il y avait trop de circulation… Moorea a semblé être le bon endroit où revenir pour mes parents. »

Ces derniers avaient de besoin de troquer l’air frais de la Bretagne pour l’air chaud de Tahiti et ses îles, pour le plus grand bonheur de Franck :

« Je me suis rapidement adapté à la douceur de vivre de Moorea. J’y ai passé une belle adolescence proche de la nature. »

Après des études d’informatique à Papeete, Franck décide de partir en vacances au Mexique :

« C’est un pays qui m’a toujours intrigué. Je suis arrivé dans la ville de Puebla pour rendre visite à mon petit frère qui y était pour quelque temps. Le Mexique n’a rien à voir avec ce que l’on voit à la télé -principalement aux infos. Bien sûr, tout n’est pas rose, comme partout, mais c’est un pays génial. Le Mexique m’a beaucoup plu, alors j’ai décidé de rester y vivre. »

Tout simplement. Et surtout surprenant. Mais pas quant on connaît Franck, un jeune homme souriant et optimiste :

« Je recherche la beauté et l’harmonie en tout et je suis toujours avide d’apprendre de nouvelles choses. »

Il tient d’ailleurs un blog sur le thème de la pensée positive.

« Quand on sort de sa zone de confort pour grandir, il ne faut pas faire marche arrière. »

Avec sa valise, son ordinateur portable et ses économies en poche, Franck décide de ne pas utiliser son billet retour et de laisser toutes ses affaires à Tahiti :

« Si j’étais rentré à Moorea, il aurait fallu que je prenne un autre aller-retour pour retourner au Mexique et perdre le retour de nouveau. Ou prendre un aller simple et payer le double… Et en tant qu’étranger, tu ne rentres pas dans un pays avec un aller simple. »

Ses affaires gardées par ses parents, Franck rachète tout au Mexique :

« J’avais suffisamment d’économies, d’autant plus que la vie est 4 fois moins chère qu’à Tahiti. Quand on sort de sa zone de confort pour grandir, il ne faut pas faire marche arrière… au risque de ne plus en sortir. »

Malgré quelques mésaventures pour l’obtention de son visa et enchaînant les visas temporaires, Franck réussit finalement à obtenir un visa de résident permanent lui permettant de poursuivre son activité de web marketeur :

« Mon réseau, je l’ai construit sur Internet. Je n’ai pas eu besoin de chercher de clients ici. »

« C’est un pays immense à découvrir, avec une culture très riche. »

Les années passent au Mexique, le frère de Franck s’en va pour raisons professionnelles, et la famille de Franck quitte la Polynésie :

« Moorea, c’est un peu comme une cage dorée, mais une cage quand même. Je pense que pour pouvoir ne pas s’y sentir enfermé, il faut avoir la possibilité économique de voyager. Partir pour mieux revenir. »

Et en 7 ans et demi au Mexique, Franck n’envisage pas encore un retour en Polynésie :

« Bientôt j’espère ! Je n’ai pas eu l’opportunité d’y retourner. J’adore le fait de vivre à l’étranger. Je ne suis jamais fiu, il y a toujours plein de choses à faire. C’est un pays immense à découvrir, avec une culture très riche. »

Même s’il le concède, certaines choses du fenua lui manquent comme « les bons steaks-frites et le poisson cru, les amis, nos merveilleux lagons, l’odeur du Tiaré Tahiti et la bringue ! ».

Et pour ceux qui s’inquiètent de partir dans un pays dont ils parlent peu voire pas la langue, Franck se veut rassurant :

« J’avais juste fait de l’espagnol au lycée et j’étais vraiment nul ! J’ai appris sur le tas. Rien ne vaut l’immersion totale. »

Le jeune homme parle aujourd’hui couramment l’espagnol :

« À tel point qu’on ne reconnaît pas mon accent français paraît-il. Souvent, les gens me demandent si je suis Colombien ou Argentin car je n’ai pas non plus l’accent mexicain. »

La barrière de la langue levée, Franck n’a pas eu de mal à s’intégrer au Mexique :

« Les Polynésiens et les Mexicains ont en commun ce côté chaleureux, amical, festif. C’est facile de se faire des amis. »

Et ils partagent aussi la même passion pour la danse.

« Parfois, en tant que "demi" on se sent un peu comme avec le "cul entre deux chaises" au niveau identitaire »

« Un jour, je me baladais, et d’un coup, j’entends sonner des to’ere… J’étais intrigué d’entendre ça, je me suis mis à en chercher la provenance. Et là, je tombe sur un groupe de danse…comme au fenua ! Ce fut mon premier contact avec la grande communauté de ori Tahiti au Mexique. »

Franck décide alors de se mettre à la danse tahitienne et intègre la troupe de danse Sao Sao Walle :

« Cela représente pour moi un lien fort avec l’une des deux cultures dans lesquelles j’ai grandi. Parfois, en tant que « demi » on se sent un peu le « cul entre deux chaises » au niveau identitaire. C’est une manière de réaffirmer cette partie de mon identité justement. »

Au Mexique, la danse tahitienne prend de l’ampleur :

« Même si nous sommes peu à pouvoir en vivre, de plus en plus de Tahitiens viennent donner des cours et des séminaires. Quand mes parents sont venus me voir, je les ai emmené à une répétition de danse, ils n’en revenaient pas à quel point la barre était haute. »

Makau Foster et Hugo Oopa sont même venus en personne voir la troupe de danse dont fait partie Franck :

« Ils voulaient s’assurer que nous respections bien la culture polynésienne. Et ils nous ont dit qu’on était l’un des meilleurs groupes du Mexique et qu’on avait le meilleur orchestre ! »

Une véritable reconnaissance pour Franck qui a remporté de nombreuses compétitions, et aimerait bien participer un jour au Heiva i Tahiti.

Pour le moment, Franck est donc des plus heureux dans sa nouvelle vie au Mexique :

« J’y resterais tant que ça me plaira. L’idéal serait de vivre la moitié de l’année au Mexique et l’autre, à Moorea. »

Si c’était à refaire, il n’hésiterait pas une seconde.

« Je me considère comme un citoyen du monde qui, par les hasards de la vie, est mi-français mi-polynésien… saupoudré désormais de piments mexicains. »

Et pour ceux que l’aventure mexicaine tenterait, « apprenez l’espagnol » conseille Franck.

« Soyez ouvert d’esprit et comme pour toute expatriation, ayez des sous en avance et organisez-vous bien. »

Noémie Schétrit
Rédactrice web

© Photos : Franck Pasquet

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